La famille des Le Cocq de Biéville a joué au long des siècles un rôle important dans notre village. Adjudicataires de la fief-ferme de Biéville* et à ce titre seigneurs du lieu pendant plusieurs générations, les Le Cocq de Biéville ont fait construire ce manoir en 1632. Cette date se détache d’ailleurs en bosse et en caractère du temps sur la façade de l’habitation.
Au milieu de la cour, entourée d’écuries, d’un pressoir, d’une grange à dîme et d’une charretterie où figure la date de 1789, se dresse un très joli puits Louis XIII surmonté d’un dôme porté par quatre colonnettes d’ordre toscan. C’est Charles Le Cocq, sieur de Biéville, échevin de Caen, qui fit bâtir ce manoir transmis ensuite à ses fils et petit-fils.
En 1679, Jean-Pierre Le Cocq céda la fief-ferme de Biéville à un certain Jean-Baptiste Colbert qui avant d’être le grand ministre de Louis XIV, s’installa dans notre région comme administrateur des biens de Mazarin, abbé commendataire de St Etienne de Caen, et s’y constitua un riche patrimoine. La fief-ferme revint ensuite aux descendants de Colbert dont son fils Jules Armand Colbert marquis de Blainville et par le jeu des successions et alliances à plusieurs familles aristocratiques (notamment les Rochechouart et les Gillain de Bénouville), jusqu’au jour où la Révolution s’empara des fief-fermes en vertu d’une loi du 12 frimaire An II.
Le manoir fut très probablement vendu comme bien national : on retrouve d’ailleurs une trace notariée de son acquisition par le sieur Couvrechef en 1793.
A la Libération, des troupes britanniques engagées dans la bataille de Caen prirent leurs quartiers dans cette propriété. A ce propos, leur interprète, un lieutenant français, nota dans ses carnets de route le 4 août 1944 : « Biéville. Ai dormi dans la maison de Colbert »…
* La fief-ferme est un contrat de bail par lequel le pouvoir royal confie la gestion d’une partie de son domaine à un vassal, moyennant une rente annuelle.
